A l’image du procès Carlton/DSK, la prostitution est souvent dépeinte sur fond de misérabilisme. Il est vrai que le train-train quotidien d’une call girl n’est pas le plus attrayant qui soit. Pourtant il existe également la prostitution dite « consentie » pour certaines femmes. C’est le cas de Tina (contactée via Internet) qui choisit ses clients et décide de son planning, un mode de vie qu’elle assume pleinement. Elle décide cependant de conserver l’anonymat en choisissant un pseudo.
Pourquoi avoir choisi de devenir escort ?
Les temps sont durs, je n’avais pas d’emploi fixe, que du précaire avec un salaire pitoyable donc j’ai choisi un secteur qui ne connaît pas la crise où le salaire est plus qu’attrayant. Après, mentalement, je pouvais le faire sans que cela affecte mon ego.
Mais ce mode de vie n’est-il pas triste ?
Ce qui est triste, c’est de devoir travailler pour vivre. Je préfère me prostituer pendant une heure que de laver des toilettes pendant une semaine. Au niveau social et affectif, c’est plus délicat. Si on me demande ce que je fais, je réponds que je suis au chômage. Quant à ma vie sentimentale, c’est très rare de trouver quelqu’un qui accepte ce mode de vie, mais je peux comprendre que ça puisse coincer à ce niveau.
Êtes-vous déjà tombée sur des malades ?
Au niveau de la sécurité, le risque zéro n’existe pas, surtout dans ce milieu opaque. Personnellement, je n’ai jamais eu de souci particulier mais je prends énormément de précautions pour éviter les mauvaises surprises. Quelques exemples : le premier RDV se déroule toujours dans un lieu public, d’autre part je ne monte jamais dans une voiture sans avoir noté en amont la plaque d’immatriculation que j’envoie à une personne de confiance, tout comme les adresses où la prestation se déroule. Enfin, je ne reçois jamais chez moi.
Parlez-moi de vos clients, certains sortent-ils des sentiers battus ?
La plupart des gens ont des demandes très classiques, il ne faut pas croire que je n’ai que des demandes de fist-fucking, de douche dorée ou de glory hole ! Ce sont essentiellement des hommes mariés victimes de leur routine amoureuse qui veulent vivre une autre sexualité sans forcément abandonner femme et enfant. Paradoxalement, ils culpabilisent moins en allant voir une call girl qu’en entretenant une relation avec une maîtresse, avec qui, il y aurait un risque de dérapage et d’attachement. Après, il y a les hommes seuls, des vieux garçons ou célibataires endurcis. Pour eux, c’est la solution de facilité, ils viennent me voir comme ils vont au cinéma, c’est-à-dire deux ou trois fois par mois quand le désir se fait sentir.
Mais ils viennent bien pour accomplir un fantasme particulier ?
Il y a aussi la catégorie « hors-série », ceux-là sont obnubilés par des lubies assez originales. Beaucoup de domination et de fétichisme. Je ne vais pas tous vous les citer mais certains m’ont marquée plus que d’autres. Un client m’a par exemple demandé de rester à quatre pattes sur le sol pendant qu’il regardait Capital en buvant son verre de cognac. Il y avait aussi le fétichiste des cuissardes qui ne prenait son pied que si je lui écrasais les bijoux de famille…
Et les avantages de ce mode de vie ?
Outre le salaire, pas de direction pour me casser les pieds, des horaires à la carte, de beaux hôtels et restaurants, des cadeaux à foison, des discussions enrichissantes et … une mutuelle santé, non je déconne !
Avez-vous tissé une relation privilégiée avec certains ?
Je joue régulièrement le rôle de confidente voire de psychologue. Ces hommes sont souvent perdus, seuls et déprimés. Ils ne savent pas à qui parler de leurs problèmes familiaux et professionnels. Il faut dire qu’avec les années, la communication avec leur compagne peut être proche du néant. Si mes clients reviennent, ce n’est pas juste pour le sexe car une certaine complicité s’est instaurée entre nous. Après, il n’y a pas de danger pour leur couple car je ne leur demanderai jamais de quitter leur femme, cela va de soi…
Propos recueillis par Doctor Paper