Focus sur le très médiatique reportage « Made in France » de Canal + (mars 2014) retranscrivant l’expérience d’un jeune journaliste relevant le défi de vivre « 100% produits hexagonaux » durant douze mois. Une volonté économique patriotique qui s’est révélée être un véritable chemin de croix.
Quand Arnaud Montebourg s’érige en véritable apôtre du « Made in France », son discours est clair, « consommer français participe au redressement de l’économie nationale ». On peut même parler de devoir citoyen. Mais dans les faits, le périple de Benjamin Carle, l’auteur du reportage, laisse dubitatif. Bien qu’il prêche pour la paroisse de l’ex-ministre du redressement productif, les conclusions de cette « immersion » démontrent que cette vie demande une organisation longue et astucieuse. L’approche sociologique du documentaire est réellement instructive. Benjamin débute cet exercice par une expertise de son appartement. Le constat est sans appel. La part de produits nationaux est insignifiante dans son logis. Le but affiché était donc d’inverser cette tendance car « vivre français », c’est se couper totalement d’un quotidien et d’habitudes d’achats qui sont presque inscrits dans notre patrimoine génétique.
Des produits indispensables non fabriqués en France
Force est de constater que certains produits n’existent plus dans le « Made in France ». Se vêtir à la française relève de la quête du Graal et reste très onéreux. Benjamin Carle passe par des petites structures faisant office d’irréductibles. En matière d’électroménager, seuls certains modèles sont encore conçus en France (plus de réfrigérateur par-contre), le choix est donc plus que limité. Certaines scènes cocasses viennent animer ce périple. Benjamin doit couper ses ongles à l’opinel et rouler en motocyclette datant des années 70. Des faits qui démontrent bien que la France a dû s’adapter à la mondialisation et sectoriser sa production pour rester compétitive.
Des patrons motivés mais un peu dépassés
De nombreuses interviews de patrons adeptes du « Made in France » ont été réalisées. Ces entrepreneurs tiennent à préserver un patrimoine français. Mais les règles de production doivent être adaptées à une problématique bien connue, des charges trop importantes. Les intermédiaires dans le process de vente sont supprimés pour limiter les coûts. L’entreprise se charge elle-même de la distribution. L’autre constat notable est que le produit réalisé en France devient un gage de qualité, le symbole d’un savoir-faire hexagonal. Le prix de vente est donc élevé et on ne les trouve pas partout.
Un pari utopique
Benjamin Carle tient finalement son pari, mais à quel prix ? Une recherche épuisante tant la diversité des produits est réduite, un investissement pécuniaire au quotidien souvent trop important et une démarche 100% patriotique qui ne relève pas du bon sens tant le protagoniste est allé loin dans sa démarche.
Pour autant, il est important de noter que le développement des produits 100% hexagonaux s’est malgré tout sensiblement développé ces dernières années. Mais pas encore assez pour que ce marché soit réellement significatif.
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